Tesla : accélérer la transition du monde vers une énergie durable

Comment TESLA, qui a placé le digital au cœur de son système (software embarqué) et repensé l’expérience client, tente de révolutionner l’industrie automobile tout en respectant la planète ? A travers ces quelques lignes, je vous livre mon analyse de cette vision qui guide TESLA.

Dans un marché automobile en pleine transformation - voiture connectée et autonome, intelligence artificielle, maintenance prédictive…, dixit nos globetrotters du Lab SQLI qui reviennent à peine du CES 2018 - de nouveaux venus (Uber, Google, Apple, Baidu, Navya, Waymo…) bousculent la hiérarchie, les repères et les business model. C’est le cas de Tesla, bien connu grâce à son fondateur Elon Musk et sa voiture électrique, qui propose une vision de la mobilité en rupture avec le marché.

Comment la marque, qui a placé le digital au cœur de son système (software embarqué) et repensé l’expérience client, tente de révolutionner l’industrie automobile tout en respectant la planète ? A travers ces quelques lignes, je vous livre mon analyse de cette vision qui guide Tesla à travers son modèle industriel et économique, d’après l’étude de Fabernovel " Tesla : Uploading the future, Décembre 2017 ”.  

1ère étape : développer une vision globale

Pour commencer, parlons un peu de cette vision portée par Elon Musk qui a pour objectif de répondre à une problématique bien plus large que le périmètre de Tesla : le réchauffement climatique.

Quelques chiffres :

  • 1936-41 : 1ère fois que la température de la surface de la terre bat des records 3 années d’affilée
  • 1976 : dernière année où la température est plus basse que la moyenne du 20ème siècle
  • 2014-2016 : 2ème fois que la température de la surface de la terre bat des records 3 années de suite

La principale cause : les émissions de CO2 (+50% en 50 ans) due à la production et consommation des énergies fossiles.

Une situation qui préoccupe Bruxelles, qui a fixé des objectifs pour 2021 sur les émissions de CO2 (« le mur du CO2 » : 95 grammes par kilomètre maximum) aux constructeurs automobiles. Lesquels réunis au Salon de Detroit, se disent inquiets devant « l’énorme défi pour tout le monde », dixit le PDG de Daimler d’après l’article des Echos.

Pour tenir leurs engagements, les constructeurs ont annoncé des investissements massifs dans l’électrification de leur gamme.

Avant de commencer un peu d’histoire : les voitures auraient pu être électriques mais l’industrie et les politiques du début du 20ème siècle en ont décidé autrement… A cela la Ford « T » plus performante, plus rapide, plus économique associée au modèle de fabrication rendu célèbre par le taylorisme, finit de tuer le moteur électrique du professeur Nikola Tesla.

 

Vous l’aurez compris la vision portée par Elon Musk vise à lutter contre le réchauffement climatique en diminuant la production et la consommation des énergies fossiles au profit de l’énergie solaire.

 < 1 % de l’énergie solaire est utilisée aujourd’hui

0,1 % de la surface de la terre avec des panneaux solaire serait nécessaire pour subvenir aux besoins des populations

90 minutes de soleil égale 1 an de consommation mondiale d’énergie

Source : US department of energy

Une vision qui doit s’inscrire dans une approche globale qui démarre avec une maison autonome grâce à l’énergie solaire, énergie qui sert également à recharger son véhicule de transport pour nous amener au travail, véhicule qui fait partie du réseau Tesla et qui permet de louer son véhicule (quand il n’est pas utilisé).

Pour mener à bien cette mission, Tesla s’est transformé en une compagnie hybride regroupant le meilleur de 3 mondes :

  • Industrie automobile : Tesla Motors, un constructeur de voiture électrique,
  • Industrie software : un constructeur qui place le software au cœur du système,
  • Industrie solaire : SolarCity, un constructeur de système de production d’énergie durable.

 

L’objectif pour Tesla est de démontrer que les véhicules électriques et la production solaire sont viables à l’échelle des populations, afin de lutter contre le réchauffement climatique.

« Tesla est la première à avoir apporté un vrai écosystème de la mobilité électrique. Auparavant, les constructeurs se concentraient sur les véhicules, sur les batteries. », estime Christophe Chaptal de Chanteloup, fondateur du cabinet CC&A consulting (et ancien du marketing de PSA), dans un article de Stratégies « Le modèle Tesla ».

 

2ème étape : développer un modèle industriel

Modèle industriel qui doit permettre de démontrer que les véhicules électriques sont performants (l’objectif du 1er modèle le Roadster), abordables (les batteries représentent 40% du prix de la voiture) et attractifs en terme d’expérience de conduite et de design (sortir du modèle « green car » au design souvent controversé).

Afin de surmonter tous ces challenges, Tesla a appliqué une méthode qu’ils ont appelé « First Principles Thinking ». L’idée étant de remonter à la source du problème plutôt que d’essayer de trouver des solutions par analogie.

Pour le prix des batteries trop chères par exemple : Comment peut-on réduire le prix ? De quoi est constitué une batterie ? Ou peut-on acheter les composants au meilleur prix ?

Cette réflexion a mené à l’utilisation de batteries aux lithium-ion (celle des ordinateurs) car d’une part le prix était en train de baisser (diviser par 10 en 15 ans) et d’autre part si on combinait les batteries en pack de 100 on obtenait une source d’énergie très performante.

Un autre challenge pour Elon Musk était de concevoir un plan de production en partant de rien, et là encore il a fait preuve d’ingéniosité ou pas…

En effet ils ont réutilisé une ancienne méthode de développement : commencer par produire un produit de niche cher, le Roadster pour attirer les early adopters et prouver que les véhicules électriques pouvaient être performant et sexy. Pour ensuite passer au modèle de tout le monde à prix raisonnable. Le tout en utilisant un système de précommande pour financer la construction du modèle et de la R&D.

 

Après le « First Principles Thinking » pour développer sa 1ère voiture, l’autre principe mis en œuvre pour la produire fut la « Vertical Integration » d’un certain Henri Ford : on construit nous même sous un même toit (Fremont Factory), avec un minimum de sous-traitance (San Francisco Bay) pour rester indépendant et en favorisant le local (États-Unis) pour réduire les coûts.

 

Avec la Model 3, Tesla a atteint son objectif de masse. Mais maintenant il doit la produire en augmentant sa capacité de production de 300% d’ici 2018 pour tenir ses engagements de précommandes !!!

Pour cela, Tesla a réinventé sa ligne de production avec plus d’automatisation (Grohmann, Perbix), une ligne multi-modèle et toujours plus de software embarqué ce qui lui permet de gagner du temps sur les phases de tests avec des tests virtualisés.

Pour soutenir cette monter en puissance, Tesla devait également s’assurer un approvisionnement en batterie suffisant. En 2016, Elon Musk a lancé la construction d’une Gigafactory dans le Nevada (en partenariat avec Panasonic) qui permettra de doubler d’ici 2020 la production de batterie et de réduire les coûts de 35%.

3ème étape : développer un business model

Un business model résolument orienté client, l’achat d’une Tesla doit être une expérience à part entière. Un store à la mode « Apple » avec une livraison à la maison du véhicule (mode conciergerie), une maintenance intégrée qui peut se faire à distance (les voitures électriques nécessitent jusqu’à 70% de moins d’actions de maintenance) et des services additionnels (assurance pour le Marché asiatique par exemple).

Toujours dans cet esprit d’expérience globale et de services additionnels, en ligne avec la vision d’autonomie globale de Musk, l’idée est de fournir des capacités de production d’énergie, de stockage grâce aux panneaux solaires fournis par SolarCity et de distribution (Powerwall).

 

Un autre élément clé du business model : le software (software is at the core of everything). En effet, le logiciel embarqué permet de contrôler le véhicule dans son ensemble et surtout de le maintenir à jour. Les mises à jour concernent l’expérience mais aussi les fonctions cœurs (firmwares) telles que le système de freins, le système d’énergie (moteur, batteries…), les capacités d’autopilot

Le secret du software c’est sa capacité à détecter un problème et suggérer la maintenance appropriée (predictive maintenance) qui dans 90% des cas peut se faire à distance. Alors que traditionnellement on attend d’avoir un problème pour amener le véhicule chez le garagiste.

L’autre avancée amenée par le software c’est la voiture autonome, un axe majeur d’évolution pour Tesla qui pour Musk va changer le monde en profondeur à l’image du passage du cheval au moteur thermique.

 

L’effet réseau Tesla, qui permet de collecter de plus en plus de données d’usage, associé à la puissance du software embarqué par Tesla « by design » (sensors, cameras, radar) et au développement de l’IA permet aujourd’hui à Tesla d’atteindre le Level 3 et d’ici 2 ans le Level 4.

Attention cependant à toutes ces annonces/prévisions autour des véhicules autonomes, l’édition 2018 de l’étude de NAVIGANT Research (https://www.navigantresearch.com/research/navigant-research-leaderboard-automated-driving-vehicles) estime que ce marché émergent va encore énormément bouger dans les prochains mois avec de nouvelles avancées technologiques et des signatures de partenariats.

Et toujours d’après cette étude, Tesla ne parviendrait pas à développer en interne des systèmes autonomes aussi efficaces que ceux précédemment fournis par Mobileye (qui a rejoint depuis l’alliance BMW/Intel/FCA).

Sur le sujet de l’intelligence artificielle, là encore Elon Musk ne fait pas comme tout le monde, en 2015, il a cofondé OpenAI, une association de recherche à but non lucratif dédiée à l’intelligence artificielle afin de s’assurer qu’elle ne détruise pas l’humanité. Il a exprimé son inquiétude sur le fait que la course pour une meilleure intelligence artificielle puisse finir par déclencher une troisième guerre mondiale.

Si vous voulez en savoir plus sur le personnage Elon Musk, je vous encourage à lire le livre d’Ashlee Vance « Elon Musk : Tesla, SpaceX, and the Quest for a Fantastic Future. » ou encore cette chronologie en image (http://www.businessinsider.fr/success-story-elon-musk#alors-quil-souleve-les-inquietudes-au-sujet-de-lia-musk-fait-la-promotion-du-potentiel-dautonomie-de-tesla).

Keep calm and dream big…

Conclusion

Dans ce marché automobile en pleine mutation technologique, où la plupart cherche à développer la voiture la plus performantela plus autonome ou la plus intelligente, la réponse d’Elon Musk au changement prend naissance véritablement dans cette vision globale.

En effet, Tesla ressemble plus aujourd’hui à une entreprise de transport et énergie connectant tous les acteurs du réseau (de la maison autonome grâce au solaire au véhicule de transport partagé).

Il me semble là que TESLA est en avance sur beaucoup, car dès la genèse son produit était un moyen de transport (et pas une « simple » voiture) à la fois connecté (construit autour du software) et autonome grâce à l’énergie solaire dans le seul but de réduire le réchauffement climatique.

Pour aller plus loin dans la mutation, cette fois-ci économique, la prochaine étape serait de transformer Tesla en une véritable plateforme de mobilité/transport où l’utilisateur pourra louer un véhicule autonome pour un trajet, le tout dans un soucis de développement durable. A la clé un nouveau business model basé sur l’usage en réduisant par conséquent l’impact sur le réchauffement climatique.

“When autonomous technology is ready you will also be able to add your car to the Tesla shared fleet just by tapping a button on the Tesla phone app and have it generate income for you while you're at work or on vacation.” (Tesla Master Plan - part Deux)

 

Sources

https://www.slideshare.net/faberNovel/tesla-uploading-the-future

http://www.businessinsider.fr/success-story-elon-musk

https://www.navigantresearch.com/research/navigant-research-leaderboard-automated-driving-vehicles

http://www.strategies.fr/actualites/marques/1047101W/le-modele-tesla.html

https://www.lesechos.fr/industrie-services/automobile/0301159954325-automobile-le-mur-du-co2-rattrape-les-constructeurs-2145381.php